Les itinérants de Montréal auront droit à un réveillon de Noël cette année, bien qu’en formule réduite, pandémie oblige. La montée des cas de COVID-19, le manque d’employés et de bénévoles ainsi que le resserrement des règles sanitaires imposées par Québec causent toutefois bien des maux de tête aux refuges de la métropole.
L’histoire se répète. Tout comme l’hiver dernier, les cas de COVID-19 augmentent dans le milieu de l’itinérance, tout comme dans le reste de la population. Les plus récentes données fournies mardi par la Santé publique de Montréal au Devoir, au moment où la Ville annonçait le retour de l’état d’urgence local, font état de 260 cas déclarés positif parmi des sans-abri et les membres du personnel des ressources qui desservent ceux-ci, entre le 1er juillet et le 18 décembre. On rapportait alors deux éclosions actives de cas de COVID-19 dans les ressources. Plusieurs organismes entendent toutefois faire dépister leurs employés dans les prochains jours, ce qui pourrait alourdir ce bilan, ont indiqué plusieurs d’entre eux au Devoir.
« Ça bouge beaucoup dans le secteur. C’est dramatique. C’est comme l’an passé », soupire le président-directeur général de la Mission Old Brewery, James Hughes. « Mais tout de même, nous préparons de super beaux repas », ajoute-t-il cependant, sur une note plus optimiste, lorsqu’on le questionne sur le réveillon de Noël qui attend les centaines d’itinérants qui fréquentent le refuge pour hommes et celui pour femmes que gère l’organisme à Montréal.
Ainsi, un succulent repas composé de méchoui d’agneau avec une salade comprenant du riz aux raisins et aux amandes sera servi aux sans-abri qui se rendront vendredi soir dans ces ressources, décorées pour l’occasion, tandis que la traditionnelle dinde sera proposée samedi midi. « On fait notre possible, mais c’est certain que ce n’est pas comme il y a trois ans », reconnaît M. Hughes. Cette année, les itinérants ne pourront enlever leur masque qu’une fois assis à leur place, qui sera séparée des autres par des panneaux de plexiglas. Ils seront aussi beaucoup moins nombreux à la fois à déguster un repas afin d’assurer le respect de la distanciation physique.
Un Noël en mode « vigilance »
« Cette année, c’est une année de vigilance. Je sais qu’on va avoir plusieurs repas qui sont spéciaux [pour le réveillon de Noël]. Mais les rassemblements, on oublie ça », tranche pour sa part le président-directeur général de la Mission Bon Accueil, Samuel Watts. Dans les dernières semaines, 40 personnes en situation d’itinérance ont été placées en isolement dans un refuge aménagé à cet effet au sein de l’hôtel l’Abri du voyageur, au centre-ville de Montréal. Or, « on pense que ça pourrait facilement se rendre à une centaine », appréhende M. Watts.
La prudence est donc de mise. Pour limiter les contacts entre les sans-abri, un contrôle serré de l’achalandage sera réalisé dans les cafétérias des différentes ressources de l’organisme, qui étireront la durée du service de repas vendredi soir pour desservir le plus de personnes possible. « Ce qu’on essaie de faire, c’est d’éviter des éclosions, surtout parmi les employés», ajoute M. Watts. Car, si plusieurs membres du personnel sont infectés par la COVID-19, « ça devient périlleux de garder les services ouverts », note également M. Hughes qui partage cette crainte.
L’organisme CARE Montréal, qui gère trois refuges dans l’est de Montréal, avait pour sa part prévu tenir une messe de Noël et servir un repas spécial à ses usagers, mais le manque d’employés dans ses ressources, relié notamment à des cas positifs à la COVID-19 détectés dans les derniers jours, a contrecarré ses plans. « Tout a été annulé », soupire son directeur général, Michel Monette. Ce dernier a d’ailleurs annulé ses vacances pour pouvoir « rester au bureau » pendant le temps des Fêtes.
« Ça fait deux ans qu’on est là-dedans [en pandémie], mais là, c’est pire que pire », laisse tomber M. Monette, au moment où la montée des cas de COVID-19, stimulée par le variant Omicron, bat des records au Québec.
Les refuges débordent
De nombreuses femmes en situation d’itinérance à Montréal pourront pour leur part se tourner vendredi soir vers le refuge de l’organisme Chez Doris, qui servira un repas italien concocté par un restaurant de Rosemère. « Les gens mangent quand même ensemble, mais tout le monde est séparé par des plexiglas », explique la directrice générale de l’organisme, Marina Boulos-Winton.
Le refuge, ouvert 24 heures sur 24, peine toutefois à répondre à la demande. Quotidiennement, une dizaine de femmes se font refuser l’entrée à l’heure des repas, tandis que de « trois à six femmes par nuit » sont refoulées à la porte, en raison du manque de lits disponibles pour répondre à la demande, explique Mme Boulos-Winton.
« On a des éclosions un peu partout [dans le milieu de l’itinérance], ce qui limite les nouvelles admissions. Et les capacités sont moindres », résume pour sa part la directrice générale de l’Accueil Bonneau, Fiona Crossling, qui constate que de nombreux itinérants viennent dormir dans le centre de jour de son organisme, après une nuit passée à l’extérieur. « C’est très stressant pour les individus qui ne peuvent pas trouver un lit », soulève-t-elle.
Mardi, la mairesse de Montréal, Valérie Plante, a indiqué qu’il manquait alors 116 places pour atteindre les 1550 prévues au plan hivernal de la Ville et de la Santé publique. La Ville a d’ailleurs entrepris des démarches en vue de combler ce manque, indique le cabinet de la mairesse. Divers organismes ont notamment évoqué au Devoir l’importance de mettre en place un deuxième site dédié à l’isolement des itinérants atteints de la COVID-19 à Montréal.
« Tout le monde est en alerte maximale », illustre James Hughes, qui trouve « fort dommage » que la Ville et le gouvernement n’aient pas mieux prévu le coup en matière de ressources pour les itinérants cet hiver.
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Source : Lire l'article complet par Le Devoir